Chanson pour septembre - Isabelle Lortholary

Couverture de Chanson pour septembre, Isabelle Lortholary
Tombée sur ce livre par hasard au gré de mes pérégrinations sur e-bibliomedia, j'ai été attirée par son titre évoquant pour moi la nostalgie qui, enfant, nous serre le cœur et le ventre à la fin des vacances, lorsqu'il faut reprendre le chemin de l'école et que l'on se dit que "c'est déjà fini". Je ne suis plus une enfant, pourtant je ressens toujours la même chose aujourd'hui, à chaque rentrée de septembre d'août. Même si mon enfant n'est pas en âge d'aller à l'école. Même si je n'ai plus de grandes vacances. Allez comprendre...

C'est un peu de cela dont il est question dans ce roman. Nous sommes bien à la fin de l'été en cette journée du 7 septembre 1975, dans le Sud de la France. Les vacances se terminent, les vacanciers désertent peu à peu le village pour rentrer chez eux.


Avec beaucoup de sensibilité, l'auteur a choisi de décrire cette journée particulière ainsi que ses conséquences sur le destin des personnages. Une journée de grandes révélations et de bouleversements, où fin des vacances rime avec fin de l'insouciance. A l'image de cette falaise qui surplombe le village, ce sont les attentes et les illusions de chacun qui s'effritent et menacent de s'effondrer. Ainsi, bien malgré elle, la petite Luce se retrouve confrontée à la duplicité des adultes lorsqu'elle découvre le vrai visage de son père Robert, qu'elle idolâtrait jusqu'alors. Luce et Robert donc, mais aussi Diane, à peine rentrée dans l'adolescence, Solange la boulangère commère du village, Aline l'apprentie coiffeuse, la douce et gentille Nicole, ou Irène la mère de famille délaissée : personne ne semble se sentir à sa place ; tous aspirent à quelque chose de meilleur, mais chacun devra composer avec ce que leur vie, la vraie, leur réserve. Pour chacun d'entre eux, il y aura un "avant" et un "après" été 1975.

L'auteur utilise un procédé original et dynamique pour nous faire rentrer dans la tête de ses personnages. On attrape leurs pensées au fil de leur apparition dans notre "champ de vision", au gré des mouvements d'une caméra qui se braquerait sur eux pour leur donner la parole. J'avais l'impression d'être une mouche, qui volette de l'un à l'autre, saisissant au passage leurs questionnements et leurs tourments intérieurs. On s'attendrit du regard encore naïf de Luce sur le monde qui l'entoure, on partage les angoisses de Nicole, qui sent son corps la trahir, les fantasmes hollywoodiens de Solange, les états d'âmes d'Irène, et nos pensées s'envolent en même temps que celles de Robert, vers sa maîtresse restée à Paris.

Avec sa plume délicate, Isabelle Lortholary retranscrit admirablement bien la chaleur écrasante de cette fin d'été, l'après-midi qui s'étire dans une douce torpeur, ou le désœuvrement de cette petite fille, poussée par l'ennui à braver les interdits. A travers ses mots et son style très personnel, on parvient à sentir aussi bien la douceur de ces moments que le poids des événements qui vont marquer les personnages, les éloigner ou les réunir. L'histoire de la vie en somme, décrite avec beaucoup d'humilité et d'humanité.

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